Les femmes à la ferme
Aux premiers chants du coq, ma mère se levait pour rallumer, dans la cheminée, le feu qui avait couvé toute la nuit sous les cendres.
Après le "pansage" (entretien du cheval) les hommes venaient prendre le premier repas du jour.
Ensuite, chacun allait à ses occupations habituelles selon les saisons.
Mais, chaque jour, les vaches tirées, le lait passé, les femmes "brassaient" la crème pour faire le beurre.
Puis venait, pour elles, les durs travaux des champs.
Elles suivaient les hommes partout.
Je les revois éparpillant le foin fauché, soulevant les lourds baquets pleins de pomme de terre, coupant le blé à la faucille pendant les trois semaines de la moisson.
Avant l'hiver, elles allaient encore, le dos courbé, trancher les feuilles de betteraves avant de les arracher.
Les vendanges ne se faisaient pas sans les femmes.
J'ai vu des femmes épandre le fumier dans les champs avant le labour, bêcher le blé au printemps pour le nettoyer, préparer tous les plants, ramasser les topinambours, attacher la vigne, arracher les "trognons" (tiges) de choux pour les faire sécher.
Je me souviens de certaines cultures réservées aux femmes et qui demandaient beaucoup de soins, comme celles du blé noir, du mil (nom de diverses céréales caractérisées par la petitesse de leur grain) et de la "mogette" (Haricot blanc).
Triée à la veillée sous une faible lumière pendant que les hommes tressaient des paniers ou des paillons (Petite corbeille ou emballage en paille).
Même dès le jeune âge, ne filait-on pas la quenouille de laine en gardant les moutons ?
Depuis les temps ont bien changé !
On ne coupe plus le blé à la faucille, le laboureur n'appelle plus ses bœufs devant la charrue.
Et on ne voit plus passer les travaux des saisons.
Les femmes de chez nous ne vont plus semer ou piquer les pommes de terre, ni charger les charrettes….
Aussi, ce n'est pas sans une certaine émotion que je vois pendant le spectacle ces femmes revenant du travail en tirant et en poussant péniblement la charrette.
Et puis, cette femme lisant la lettre du soldat de la tranchée me rappelle toutes celles qui pendant la guerre avait pris la place de leur mari absent pour diriger la ferme.
Aujourd'hui, le cadre est différent, les travaux ne sont plus les mêmes.
Mais sur notre chemin, ne retrouvons-nous pas au Puy du Fou et ailleurs les femmes courageuses d'antan ?
J. Maupillier (Garde)