La Vendée, une région essentiellement rurale, ne se réduit pas à une simple opposition entre campagne de l'intérieur et côte. De même, cette terre, ensanglantée par les luttes fratricides entre bleus et blancs, est le produit d'une tradition séculaire dont chaque hameau et chaque métairie portent la marque. Il y a, dans l'architecture rurale du Bas-Poitou, une certaine permanence des modes, des recettes, qui constituent l'un des traits fondamentaux de ce pays. Le Bocage englobe la majeure partie septentrionale du département. Dans cette contrée humide et austère, les roches cristallines dominent, essentiellement les granits gris ou rose, les schistes, ardoisiers ou micaschistes, qui contribuent à donner à l'habitation du "Bocquin" une tonalité sombre, que vient parfois égayer, dans les marches méridionales, l'emploi ponctuel de pierre calcaire claire provenant de la Plaine, notamment pour les éléments architectoniques.
Cette partie de la Vendée est celle qui reste la plus attachée au souvenir des guerres de Vendée. Longtemps pauvre, cette région n'a connu un certain essor qu'au siècle dernier. Pays de grandes propriétés, le Bocage est pourtant très morcelé en petits hameaux, et en unités d'exploitation isolées, perchées sur un replat ou un mamelon ensoleillé. La ferme ou la métairie du Bocage est généralement constituée par un ensemble de bâtiments ordonnés autour d'une vaste cour, parfois fermée par un porche traversant le bâtiment principal. La maison d'habitation, qu'elle soit isolée ou prise dans un ensemble, a souvent un volume important, avec ou sans étage.
Le plan en est simple, quadrangulaire, avec parfois une aile plus basse en retour, prolongée par un hangar ou une cave. Les ouvertures sont rares et étroites, surtout dans le Haut-Bocage, et il n'est pas rare de rencontrer des logis dont seule la façade regardant le soleil soit percée de fenêtres. Cette parcimonie dans l'aération des façades, alliée à l'absence quasi générale d'éléments d'architecture noble tels que corniches saillantes, linteaux ou jambages ornés, contribue à donner à l'habitat rural "bocquin" un aspect fruste et monolithique.
Seule la tuile canal, appelée en Vendée "tige de botte", donne à ces constructions de moellons de schistes équarris une touche colorée. Cette tuile canal est le plus souvent posée directement sur les têtes de murs-pignons sans déborder. Ce n'est que vers la fin du siècle dernier que l'on a construit des fermes débordantes destinées à évacuer l'eau de ruissellement loin des murs. Les bâtiments composant l'exploitation sont généralement de plan très simple, généralement rectangulaire. La grange est vaste et elle a souvent été augmentée d'un appentis servant de remise à outils, cellier et de l'autre côté, se trouvent les toits à cochons.
Ces modes de construction du Bocage sont vraisemblablement anciens et se sont maintenus jusqu'à l'aube de notre siècle.
La région de la Vendée, située dans l’ouest de la France, a joué un rôle crucial pendant la Révolution française et a été un conflit sanglant qui a opposé les républicains (surnommés les "bleus") aux royalistes (les "blancs").
Malgré son soutien initial à la Révolution, la Vendée s’est progressivement opposée au nouveau régime, donnant lieu à une rébellion armée connue sous le nom de "Guerre de Vendée".
L’une des principales tactiques utilisées par les Vendéens était celle des embuscades, permettant à ces paysans insurgés de harceler et de surprendre les troupes républicaines, ce qui a eu un impact décisif sur le cours du conflit.
Les Vendéens étaient un groupe hétéroclite de paysans, de nobles qui craignaient de perdre leurs privilèges et de prêtres royalistes qui se sont soulevés contre la Révolution française.
Issus principalement de familles catholiques et monarchistes, ils refusaient les changements politiques, sociaux et religieux imposés par le nouveau régime républicain.
Malgré leurs origines diverses, les Vendéens partageaient un profond attachement à la Couronne, à l’Église catholique et aux traditions de l’Ancien Régime.
Leur soulèvement a pris la forme d’une véritable guerre civile, marquée par une résistance acharnée et des affrontements particulièrement sanglants avec les forces républicaines.
Conscients de leur infériorité numérique et de leurs moyens limités face à l’armée républicaine, les Vendéens ont développé une stratégie de guérilla basée sur une grande mobilité et des attaques par surprise.
Ils ont ainsi tiré parti de leur excellente connaissance du terrain vallonné et boisé de leur région pour tendre des embuscades à leurs ennemis.
Les Vendéens choisissaient soigneusement les lieux propices aux embuscades, comme des chemins creux, des carrefours, des ravins ou des paysages composés de haies.
Ils se dissimulaient dans la végétation ou derrière des obstacles naturels, attendant patiemment le passage des troupes républicaines pour les prendre par surprise et les accabler sous un feu nourri.
L’effet de surprise était essentiel aux embuscades vendéennes.
Grâce à un vaste réseau d’informateurs et de signaux, les Vendéens pouvaient se mobiliser rapidement et de manière coordonnée pour mener leurs embuscades.
Ils pouvaient ainsi se rassembler rapidement sur les lieux choisis pour l’embuscade, tout en restant extrêmement mobiles pour éviter d’être encerclés.
Cette agilité leur permettait de frapper, de se replier, puis de réapparaître ailleurs.
Ils utilisaient des cloches d’églises, les ailes des moulins à vent pour se prévenir de l’arrivée des forces ennemies et se rassembler en un point stratégique.
En multipliant les embuscades, les Vendéens ont réussi à harceler et à user les troupes révolutionnaires, les empêchant de mener une campagne militaire efficace.
Contrairement à l’armée républicaine, les Vendéens privilégiaient un armement rudimentaire, léger et maniable, des bâtons, des piques, des faux emmanchées à l’envers, des fourches aiguisées, des couteaux de sabotier, et plus tard, des fusils et des baïonnettes pris à l’ennemi, renonçant ainsi à l’utilisation d’artillerie lourde et de cavalerie.
Habitués à manier ces armes avec une grande précision, c’était un atout décisif dans les combats rapprochés des embuscades.
Grâce à ces attaques surprises, les insurgés ont remporté de nombreuses victoires tactiques, s’emparant d’armes, de munitions et d’équipements qui ont renforcé leur capacité de combat.
Mais ces ressources s’épuisaient rapidement face à l’intensité des combats et cet appauvrissement progressif a sérieusement compromis la durabilité de leur effort de guerre.
Les embuscades ont considérablement retardé et usé les forces républicaines, les obligeant à s’adapter constamment à cette tactique guérilla.
Cet enlisement des troupes républicaines a contribué à freiner la progression de la Révolution dans l’ouest du pays, forçant le gouvernement à dévier une partie de ses efforts militaires pour faire face à la résistance vendéenne.
Devant les embuscades vendéennes dévastatrices, les forces républicaines ont dû s’adapter et ajuster leur stratégie pour écraser la rébellion.
Initialement déstabilisées par la mobilité et l’effet de surprise des attaques vendéennes, les troupes républicaines ont progressivement développé de nouvelles tactiques pour contrer cette forme de guerre irrégulière, notamment en adoptant des armes plus légères et maniables, mieux adaptées aux combats en milieu forestier.
L’un des principaux défis a été d’identifier les zones propices aux embuscades et d’y déployer des mesures de sécurité renforcées.
Les républicains ont ainsi appris à mieux surveiller les routes, les chemins creux et les zones boisées susceptibles d’être utilisés par les insurgés pour tendre leurs pièges.
Ils ont également amélioré leur renseignement et leur coordination pour mieux anticiper les mouvements des Vendéens.
Les combats incessants, la perte de proches et l’insécurité permanente ont pris un lourd tribut sur le moral des Vendéens.
Malgré leur ténacité, cette guerre d’usure a progressivement érodé leur détermination, les rendant vulnérables à la fatigue et au découragement.
La nécessité de déployer des ressources importantes pour faire face à la guérilla vendéenne a aussi engendré des coûts humains et financiers considérables pour le gouvernement révolutionnaire.
Les difficultés rencontrées dans la Guerre de Vendée ont contribué à fragiliser le jeune régime républicain, qui a dû faire face à de multiples défis sur plusieurs fronts.
L’héritage des embuscades vendéennes s’est durablement inscrit dans l’histoire militaire.
Au-delà de leurs succès tactiques, les Vendéens ont contribué à façonner de nouvelles doctrines militaires.
Les tactiques innovantes développées par ces insurgés, mêlant mobilité, élément de surprise et soutien de la population locale, ont servi de modèle pour de futures doctrines de guerre irrégulière.
La participation active des femmes et des civils a également souligné l’importance du soutien de la population dans ce type de conflit asymétrique.
La capacité des Vendéens à s’adapter constamment aux réponses des républicains a également mis en lumière l’importance fondamentale de la flexibilité et de l’adaptabilité dans les opérations militaires modernes.
La guerre n’est plus une succession de manœuvres préétablies, mais un processus dynamique où l’anticipation et l’innovation sont essentielles pour surpasser un adversaire agile et déterminé.
Grâce à leurs tactiques innovantes de guérilla, ces insurgés ont réussi à tenir tête pendant plusieurs années aux forces républicaines mieux équipées, infligeant de lourdes pertes et retardant considérablement la progression de la Révolution dans l’ouest du pays.
Bien que finalement vaincus, les Vendéens ont laissé une empreinte indélébile sur l’art de la guerre, inspirant les stratèges militaires futurs.
Ce conflit reste l’un des épisodes les plus tragiques de l’histoire de France entre 1793 et 1796, suscitant encore aujourd’hui des débats idéologiques et des controverses sur la qualification de "génocide".
Ces affrontements, ont été très meurtriers, avec un bilan estimé à au moins 300 000 morts soit par les combats, soit par les exactions républicaines.
Les villages incendiés et les terres ravagées ont laissé des cicatrices profondes dans le paysage et dans les cœurs des Vendéens.
Par exemple, à Nantes, le révolutionnaire Carrier noyait ses victimes dans la Loire, tandis que les tristement célèbres "colonnes infernales" de Turreau ravageaient le Bocage.
Bien que la guerre de Vendée ait officiellement pris fin en 1796, des heurts ont persisté jusqu’en 1832, d’où l’appellation des "Guerres de Vendée".
La guerre a laissé une division profonde entre les Vendéens eux-mêmes, et entre la Vendée et le reste de la France.
Cette division a perduré pendant des générations et a influencé la politique locale et nationale.
Le traumatisme de la guerre a profondément marqué la mémoire collective en Vendée.
Les récits de la guerre ont été transmis de génération en génération, renforçant un sentiment d’identité distincte.
La guerre a également eu un impact sur la pratique religieuse en Vendée.
La persécution de l’Église catholique pendant la guerre a renforcé l’attachement des Vendéens à leur foi et à leurs traditions religieuses.
Temps fort, laissé à l'envergure des aigles, faucons et vautours.
Surgissant du haut des cieux, l'aigle impérial, maître de l'espace, fond sur la foule, tel une pierre.
Le ballet incessant des grands rapaces est réglé au doigt et à l'œil par les fauconniers, passés maîtres dans l'art de doser savamment rires et émotions.
On est à deux doigts de les toucher et tout l'art des fauconniers est de maîtriser leur vol puissant sans rien enlever à l'émotion.
Aussi doués pour faire tournoyer les grands rapaces que les petits, les fauconniers du Grand Parc ont donné à leur art une envergure internationale.
Les raisons de ce succès ?
Le site du spectacle est établi sur les ruines de l'ancien château du Puy du Fou.
Sur les vestiges envoûtants du vieux château médiéval, laissez-vous entraîner par l'inoubliable ballet aérien des oiseaux en liberté.
Les rapaces ont retrouvé les courants ascendants, pour l'une des plus belles manifestations de fauconnerie d'Europe.
Mais aussi la qualité de l'équipe et un sens du spectacle qui prend chaque année de la hauteur avec des lâchers d'oiseaux en altitude à partir de ballons.
Temps fort.
Au cœur du public, le maître de volerie lance ses oiseaux de proie, comme autrefois.
Evolutions tout en beauté, puissance et envergure.
Faucons, aigles, vautours s'élancent, prennent le sens du vent avant de fondre au-dessus des spectateurs dans un ballet saisissant.
Dans ce spectacle unique, les aigles, vautours, faucons du Puy du Fou sillonnent les airs, attrapent les courants, rasent le public et plongent sur les bras des fauconniers.
Ces maîtres "danseurs" règlent ce ballet céleste sans égal.
Aujourd'hui l'Académie de Fauconnerie du Puy du Fou est reconnue comme l'un des fleurons mondiaux des centres de reproduction et d'élevage de rapaces.
Elle contribue ainsi activement à la préservation d'espèces menacées ou en voie de disparition.
D'après mes grands-parents, avant la tourmente de 1793, le Bocage était recouvert de bosquets et de fourrés épais.
Les terres incultes envahies d'ajoncs rendaient le pays presque impénétrable.
Une seule route traversait la région.
Dans ce fouillis de verdure se blottissaient de petits villages, à deux ou trois lieues l'un de l'autre (1 lieue= +/- 4,5 km).
Ici et là, émergeait d'une colline un clocher entouré de maison.
Un monde mystérieux d'oiseaux mêlait ses cris au martèlement du métal sur l'enclume.
À travers les haies touffues parvenaient les voix du "bouvier" conduisant son attelage aux champs.
La contrée était calme.
Mais ce n'est pas sans une certaine frayeur que l'on suivait les chemins encaissés et étroits.
Dans mes jeunes années, j'allais souvent au village voisin porter à mon oncle un panier débordant de produits de notre ferme.
Il était sabotier.
Il travaillait toute la journée, arrivant à peine à satisfaire ses clients.
En été, il fabriquait des sabots de bois de vergne (aulne) plus légers à porter.
En hiver, le bois d'ormeau très dur et plus lourd ne facilitait pas sa tâche.
En ce temps-là, le village pouvait se suffire à lui-même.
Ne trouvait-on pas un artisan dans la plupart des maisons ?
J'entendais le claquement des métiers à tisser dans les caves.
J'aimais m'arrêter devant le potier.
Sous ses doigts agiles, la terre argileuse devenait, tout à tour, cruche, plat ou écuelle…
Je parcourais les rues faites de terre battue, empierrées par endroits.
De chaque côté, bâties de plain-pied, les maisons se faisaient faces, attenantes à un bout de jardin.
Des treilles et des poiriers en garnissaient les façades non crépies, aux portes pleines et aux petites fenêtres à barreaux.
Sur une colline toute proche, le vent faisait tourner les ailes d'un moulin.
Le meunier tirait également profit d'une petite rivière où le moulin à eau produisait la farine.
Les fermiers se ravitaillaient chez lui avant de cuire le pain au four.
Entre-temps, le meunier se faisait rebouteux, guérisseur, arracheur de dents et sa renommée dépassait de loin le village.
On le comptait parmi des "notables" de la bourgade.
Sans nul doute, le forgeron occupait également une place importante au village.
Il avait supplanté les petites forges et les enclumes des fermiers qui, jusqu'alors, fabriquaient ou réparaient eux-mêmes leurs propres outils.
Toute la journée, son enclume résonnait comme le tintement d'une petite cloche.
Les rues étaient animées par le travail des artisans.
Je m'attardais souvent devant l'atelier du charron, fasciné par le brasier et le cercle de fer chauffé à blanc.
J'étais subjugué par les gestes vifs et calculés que les hommes exécutaient pour poser ce cercle incandescent sur la roue de charrette.
Je revois encore la fumée qui s'échappait et j'entends le grésillement du bois.
Vite un seau d'eau pour refroidir !
Cela se passait devant l'échoppe du charron.
J'accompagnais les femmes au puits de la petite place.
Le treuil se déroulait vite.
J'écoutais le grincement de la chaîne et le bruit particulier que faisait le seau en tombant dans l'eau.
Avec les garçons de mon âge, que de fois, je me suis penché par-dessus la margelle pour me mirer dans d'eau profonde !
La population vaquait à ses occupations du matin au soir.
Travail pénible, sans doute, mais les fêtes familiales et religieuses, les noces, la fête du Saint-Patron marquaient un temps d'arrêt.
Malgré la visite des colporteurs qui venaient offrir leurs marchandises, nous allions aux foires très fréquentées dans les environs.
Le soir, nous rapportions "la part de foire" à ceux qui gardaient la ferme.
C'est Monsieur le Curé, principal personnage du village, seul lettré, la plupart du temps, qui m'avait appris à lire.
Il tenait les registres paroissiaux qui faisaient état d'actes religieux, baptêmes, mariages et sépultures qui cadençaient la vie des gens.
La population rurale se rassemblait aux offices chaque dimanche.
À la sortie de l'église, on aimait se raconter les dernières nouvelles et discuter des travaux de saison.
Ces rencontres se prolongeaient souvent bien après l'heure du repas.
L'enfant que j'étais, observait cette population active, tenace, attachée à sa terre et qui devait sa prospérité au travail de chacun.
Je connaissais tous les gens.
Malgré leur dure besogne, ils me paraissaient heureux.
J'en conserve une image de bonheur et de sérénité.